La marée était restée continu toute la lumière, figée comme retenue par un sens qui ne suivait plus aucune sorte de distinction de lune. Les intermédiaires étroits de la mangrove avaient cessé de marquer. L’eau stagnait, lourde, épaisse, reflétant non pas le ciel, mais une masse trouble venue d’en dessous. La antédiluvienne femme observait cela sans bouger. Depuis le dernier appel salué via phil voyance, elle n’attendait plus d’indices dans les feuillages ou les souffles aériens. La voyance par téléphone s’était déportée dans un autre registre, efficace, souterrain, presque minéral. Les voix qui passaient par la ligne devenaient de plus en plus calmes, tels que ralenties par l’air même de la forêt. Chaque mot semblait porter une humidité dense, une preuve invisible mais présente. Phil voyance, en réalisant ce lien ample et intelligible, avait revêtu en branle une histoire ancienne qui refusait de se défendre enfouie. La voyance gratuite, humble dans sa forme, s'était muée en dispositif de rayonnement entre les personnes et l’épaisseur du monde. Ce matin-là, en bouleversant le tissu de guidance, elle sentit qu’aucun message ne viendrait du vent. Ce a été la vase elle-même qui parla. Sous la pression de ses clavier, un modèle apparut : une spirale discontinue, tels que une carte oubliée. Les crêtes de la mangrove s’étaient déformées, réalisant une configuration inhabituelle repérée par les hérons qui ne survolaient plus certains secteurs. Quelque chose, au milieu de cette noeud, refusait la luminosité. Un ensemble d' informations arriva sans signal sonore, à savoir s’il s’était glissé par une brèche dans le système. Aucune voix ne s’exprima. Et toutefois, elle se rendit compte. Ce n’était plus communiquer, mais un rappel. Un souvenir que la planisphère aimerait favoriser protéger. La voyance par téléphone, portée par phil voyance, n’était plus conçue pour apprendre : elle était devenue le vecteur d’une flagrance refoulée par des générations. La révolue masculinité ressentit une poussée sous la case. Les pilotis vibrèrent légèrement, tels que traversés par un habituel souterrain. Sous la surface figée des eaux, un ancestral couloir s’ouvrait, entre les venues les plus vieilles. Là dormait un fragment d’histoire, si ancestral que même les arbres ne le murmuraient plus. Mais le malice, désormais, savait où chercher.
